Une du n°478 de Paris Match (7 juin 1958)
PrĂ©sentationÂ
Une en quadrichromie de lâhebdomadaire Paris-Match en date du 7 juin 1958.
Contextualisation
La dĂ©cennie 1958-1968 est riche en Ă©vĂ©nements internationaux comme la crise des fusĂ©es de Cuba et nationaux Ă commencer par le contexte du retour du gĂ©nĂ©ral de Gaulle (ici Ă©voquĂ©e par une photographie prise Ă Colombey-les-Deux-Eglises). Cette dĂ©cennie est marquĂ©e par de profondes mutations du systĂšme mĂ©diatique avec lâaffirmation du rĂŽle de lâaudiovisuel de masse. Dans le mĂȘme temps, au sein de la presse Ă©crite, la presse quotidienne populaire dĂ©cline tandis que sâaffirme les hebdomadaires illustrĂ©s dâinformations politiques et gĂ©nĂ©rales.
Analyse
A la  fin des annĂ©es 1930, le genre magazine fut renouvelĂ© Ă lâinitiative du groupe de presse Jean Prouvost par les lancements de Marie Claire, (magazine empruntĂ© au journalisme amĂ©ricain), en mars 1937, et de Match, ancien magazine sportif, rachetĂ© en juillet 1938 Ă LâIntransigeant et transformĂ© en magazine de grande actualitĂ© directement inspirĂ© de Life (publiĂ© Ă New York pour la premiĂšre en 1936). Ces deux magazines eurent un succĂšs rapide : Match atteint ainsi un tirage de 1,4 million dâexemplaires en octobre 1939. Interrompu le 6 juin 1940 (no 102), Match cesse de paraĂźtre durant la Seconde Guerre mondiale. HĂ©ritier du Match dâavant-guerre, Paris-Match est relancĂ© le 25 mars 1949. En 1958, annĂ©e record de sa diffusion, il est tirĂ© Ă 1,8 million dâexemplaires. Paris Match est le plus diffusĂ© des hebdomadaires français. Aucun autre magazine ne voit la composition de son lectorat se rapprocher autant de celle de la population française dans son ensemble. Profitant de ce lectorat de masse, le magazine est couvert Ă 34% par la publicitĂ©. Son succĂšs tient Ă lâutilisation de la quadrichromie aussi bien en couverture quâĂ lâintĂ©rieur du journal pour prĂšs de la moitiĂ© des photographies publiĂ©es. Celles-ci sont lâautre clĂ© du succĂšs : En 1958-1959, 70,7 % de la surface rĂ©dactionnelle sont occupĂ©s par la photographie (ici le titre en gros en haut Ă droite insiste justement sur la spĂ©cificitĂ© du photoreportage : « derniĂšre heure photo »).
A partir de 1960, les tirages ont fortement baissĂ© en raison de la double concurrence des hebdomadaires spĂ©cialisĂ©s et surtout de la tĂ©lĂ©vision qui devient mangeuse de temps, dâintĂ©rĂȘt et, progressivement, de publicitĂ©, gĂ©nĂ©rant Ă©galement des magazines dĂ©diĂ©s.
Chaque semaine, une confĂ©rence de rĂ©daction dĂ©termine le contenu de la couverture. Ce choix, Ă©minemment stratĂ©gique, est fonction gĂ©nĂ©ralement de lâactualité : ici le retour du gĂ©nĂ©ral de Gaulle au printemps 1958 (cf. lĂ©gende minuscule en bas Ă gauche de la Une). Il va commander le succĂšs ou la mĂ©vente du numĂ©ro : beaucoup dâacheteurs se dĂ©cident au vu de la couverture. Elle doit ĂȘtre vite vue et lue ; son texte est concis, et elle comporte gĂ©nĂ©ralement une seule image. Image et texte sont complĂ©mentaires : ce qui se voit nâa pas besoin dâĂȘtre dit. Ici la Une est personnifiĂ©e : depuis la crĂ©ation du magazine, De Gaulle arrive au 7Ăšme rang des personnalitĂ©s (derriĂšre des personnalitĂ©s de lâaristocratie et du spectacle) qui ont fait plusieurs fois la Une du magazine et le premier dans le domaine strictement politique (entre 1949 et 1976, la moitiĂ© des couvertures est occupĂ©e par les rubriques politique et sociĂ©tĂ©) ; sur la pĂ©riode 1955-59 il est en 3Ăšme position et en 1Ăšre sur la pĂ©riode 1965-69. Il ne sâagit pas dâun portrait posĂ©. La photographie est prise Ă Colombey-les-deux-Eglises comme le confirme la lĂ©gende : il sâagit de montrer de Gaulle sortant de sa retraite haut-marnaise.
Ressources complémentaires :
Bibliographie :
Jean-Pierre Bacot, « La naissance du photo-journalisme : le passage d’un modĂšle europĂ©en de magazine illustrĂ© Ă un modĂšle amĂ©ricain », RĂ©seaux, n°151, mai 2008, pp.9-36.
Alain Chenu, « Les sentiers de la gloire : sociologie des couvertures de Paris-Match », Revue Française de Sociologie, vol. 49, 2008, n° 1.