De Gaulle : l’héritage et les héritiers
Place dans les programmes
Programmes de collège :
- En classe de Troisième, dans le Thème 3 « Françaises et Français dans une République repensée » et tout particulièrement le deuxième sous-thème : « La Vème République, de la République gaullienne à l’alternance et à la cohabitation ».
(BO spécial n°11 du 26 novembre 2015)
Programme de lycée :
Programmes de Terminale :
- Terminale générale – Thème 3 : Les remises en cause économiques, politiques et sociales des années 1970 à 1991. Chapitre 2. Un tournant social, politique et culturel, la France de 1974 à 1988.
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(BO spécial n°1 du 6 février 2020)
Objectifs pédagogiques
Cette étude, faite dans le cadre du programme des classes de Terminale des séries générales ES et L dans les chapitres « Gouverner la France depuis 1946 : État, gouvernement et administration. Héritages et évolutions » et « Le projet d’une Europe politique depuis le congrès de La Haye (1948) », consacrée aux héritages et aux héritiers du général de Gaulle montre l’influence de l’action de l’homme d’État au-delà des limites de sa présence à la tête de l’État et démontre comment Charles de Gaulle inspire, influence, sert de modèle ou de repoussoir pour de nombreuses personnalités politiques d’aujourd’hui, au point de structurer une partie importante de notre paysage politique contemporain. Elle permet en outre d’aborder la question de la variété des sources et l’exercice de l’analyse de document, méthode à acquérir pour les épreuves de baccalauréat.
Introduction
L’héritage est un terme qui revêt deux sens majeurs en fonction du fait que celui-ci concerne un bien matériel ou un caractère moral. Dans le premier cas, l’héritage correspond alors à l’idée de patrimoine laissé par un partant et recueilli par voie de succession. Dans le second cas, l’héritage est presque synonyme de transmission de la tradition. Quand cet héritage concerne un chef d’État, il est possible de considérer que l’héritage couvre les deux acceptions évoquées.
La dimension patrimoniale existe dans le sens où, dans l’exemple de De Gaulle, celui-ci a reçu en 1958 une France, avec des frontières précises et des institutions précises – construites sur mesure principalement par Debré, charge à lui, théoriquement, de transmettre la même France à l’issue de son mandat pour que le président de la République suivant puisse en être garant et la transmettre à son tour au suivant, etc. Sauf que, le contexte du début de présidence de Charles de Gaulle l’empêche de redonner l’entièreté du patrimoine français à son successeur puisque le processus de décolonisation – violente comme en Algérie ou négociée comme au Sénégal – a fait son œuvre. Reste le versant institutionnel, qui a malgré tout été modifié assez sensiblement.
La dimension morale ou autrement dite culturelle, traditionaliste peut également se rattacher à l’expérience de De Gaulle et ses successeurs puisque Charles de Gaulle est un homme politique, un écrivain, un chef de guerre, etc. Ainsi, Charles de Gaulle laisse une vision sociétale et du monde qui lui est propre tout en ayant eu une influence considérable sur les hommes et femmes de son temps eu égard à son exceptionnel parcours. Dès lors, peut exister un héritage gaulliste, si des hommes et femmes de son temps ou des périodes suivantes se reconnaissent en l’homme, son parcours, ses valeurs, ses pensées.
Il existe donc une différence majeure entre l’héritage gaullien (patrimonial) et l’héritage gaulliste (moral/culturel/politique). L’analyse du premier versant, où le sujet pourrait être de savoir si l’héritage « patrimonial » gaullien a été conservé par ses successeurs, n’est pas dénuée d’intérêt mais la dimension territoriale n’est pas au cœur de notre réflexion ; là n’est pas notre sujet. Cette étude s’intéresse aussi, de fait, à l’héritage symbolique, culturel et politique de Charles de Gaulle ; au point qu’il est possible de constater que cet héritage se poursuit jusqu’à aujourd’hui faisant du gaullisme un véritable particularisme français. S’il existe un héritage visible, palpable, mesurable aujourd’hui encore, cela signifie donc que des héritiers visibles et audibles revendiquent plus ou moins expressément leur gaullisme tandis que d’autres se positionnent en contrepoint
Problématique
Dans quelle mesure les héritages politiques de De Gaulle (ou pour mieux dire gaulliens et gaullistes) sont-ils aujourd’hui objet de débats, discussions et controverses puisqu’ils sont captés par les uns, rejetés par les autres, distordus par d’aucuns ?
Démarche pédagogique
L’héritage – ou pour mieux dire les héritages – du général de Gaulle dans la France contemporaine est si divers, diffus et important qu’il semble improbable d’en dresser une liste exhaustive. Bien sûr, viennent en mémoire de manière immédiate le droit de vote des femmes, la Sécurité Sociale, la constitution de la Cinquième République, etc. Au sein de cet héritage si varié et crucial encore aujourd’hui, nous avons décidé de mettre en lumière d’abord la transformation constitutionnelle de novembre 1962 (document 1) qui assied définitivement la fonction de chef de l’État comme pierre angulaire du système politique français puis le rapprochement franco-allemand et la construction européenne (document 2) tant ces héritages sont aujourd’hui objet de controverses vives dans les débats politiques comme par exemple celui qui a opposé Emmanuel Macron et Marine Le Pen entre les deux tours de l’élection présidentielle de 2017 alors même que les deux candidats se revendiquaient comme héritiers du général (document 4).
Il est vrai qu’aujourd’hui encore les héritiers sont nombreux à réclamer la caution – politique, morale, etc. – du général de Gaulle (document 5), parfois au grand dam des gaullistes historiques ou des descendants même du général.[2] Ces héritiers politiques d’aujourd’hui s’inscrivent dans les pas du Général par le biais des mots et la reprise de citations de Charles de Gaulle ou en invoquant son nom au cours de discours sans que les liens directs entre eux et lui puissent être immédiatement faits. Dans la presse écrite, sur les sites d’information en ligne, dans les réseaux sociaux, le nom du général de Gaulle est presque incessamment cité par les hommes politiques d’aujourd’hui et pas seulement ceux de la droite et ou du centre – qui peuvent apparaître comme les héritiers « naturels » du général de Gaulle.
La situation est bien différente au cours des premières années de la Cinquième République où les héritiers ont bien évidemment des liens réels et directs avec le général de Gaulle au point qu’ils usent dans leur communication politique de codes visuels gaulliens évidents. Il en est ainsi de la photographie officielle du président de la République Georges Pompidou (document 3), deuxième président de la Cinquième République après Charles de Gaulle ou encore en 1976, lors de la création du RPR par Jacques Chirac (document 4).
Dans un premier temps, les élèves doivent rechercher dans le manuel ou sur internet les héritages de la période 1958/1969 dans nos instituions ou l’organisation de la vie politique, le travail peut se faire en groupes puis des échanges oraux sont organisés, cela permet de faire des révisions.
Un temps plus d’approfondissement peut être conçu sur la fonction du chef de l’état à partir du document 1, en quoi la modification du mode d’élection du président modifie la fonction présidentielle ? En quoi le document 3 renforce cette notion de « monarchie républicaine ? Comparer ces deux photographies officielles avec celles des trois derniers présidents (recherchées sur internet) quels sont les points communs et les différences ?
Décrire la photographie du document 2, en quoi a-t-elle une forte charge symbolique pour celer le rapprochement franco-allemand ?
Quelles ruptures et quelles continuités peut-on dégager de cette histoire des partis (document 4) ?
Un travail spécifique peut être construit sur la dernière partie du dossier pour monter comment l’héritage du Général a participé aux dernières élections présidentielles : recherche de symboles , de termes de vocabulaire à classer en fonction du positionnement sur l’échiquier politique.
Ressources complémentaires :
Bibliographie
Annie Collovald, Jacques Chirac et le gaullisme. Biographie d’un héritier à histoires, Paris, Belin, 1999.
Giorgio Dominese, « Le gaullisme à venir sera, paradoxalement, européen », Outre-Terre, vol. 33-34, n° 3, 2012, pp. 37-42.
Pierre Guillaume, Sylvie Guillaume, Réformes et réformisme dans la France contemporaine, Paris, Armand Colin, 2012.
Michel Korinman, « Oublier de Gaulle », Outre-Terre, vol. 33-34, n° 3, 2012, pp. 11-26.
Vingtième Siècle. Revue d’histoire, « Nouveaux regards sur le gaullisme et les gaullistes », n° 116, 2012/4.
Michel Winock, « Les métamorphoses d’un gaulliste », L’Histoire, vol. 313, n° 10, 2006, pp. 36-38.
Sitographie
« L’héritage disputé du général de Gaulle », L’Obs, 9 novembre 2010
« De Gaulle, un héritage disputé par tous », L’Express, 2 mai 2017 :
« Le gaullisme sans de Gaulle ou l’impossible héritage, Le Monde, 16 juin 2010 :