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Place dans les programmes

Programmes de collÚge : 

  • TroisiĂšme : ThĂšme 3 « Françaises et Français dans une RĂ©publique repensĂ©e », la partie 3 : « Femmes et hommes dans la sociĂ©tĂ© des annĂ©es 1950 aux annĂ©es 1980 : nouveaux enjeux sociaux et culturels, rĂ©ponses politiques ».  (BO spĂ©cial n°11 du 26 novembre 2015)

Programme du lycée :

  • Terminale GĂ©nĂ©rale – ThĂšme 2 : « La multiplication des acteurs internationaux dans un monde bipolaire (de 1945 au dĂ©but des annĂ©es 1970) » ; Chapitre 3 : « La France, une nouvelle place dans le monde », objectifs :  « Les dĂ©buts de la Ve RĂ©publique : un projet liant volontĂ© d’indĂ©pendance nationale et modernisation du pays » ; points de passage « Charles de Gaulle et Pierre MendĂšs-France deux conceptions de la RĂ©publique », « La constitution de 1958 »
  • Terminale GĂ©nĂ©rale – spĂ©cialitĂ© histoire-gĂ©ographie, gĂ©opolitique et sciences politiques –

ThĂšme 4 – « Identifier, protĂ©ger et valoriser le patrimoine : enjeux gĂ©opolitiques » ;

Axe 1 « Usages sociaux et politiques du patrimoine » ;

Axe 2 « Patrimoine, la prĂ©servation entre tensions et concurrences », Urbanisation, dĂ©veloppement Ă©conomique et prĂ©servation du patrimoine. Paris entre protection et nouvel urbanisme  » ;

OTC « La France et le patrimoine, des actions majeures de valorisation et de protection », – La gestion du patrimoine français : Ă©volutions d’une politique publique », « Le patrimoine, facteur de rayonnement culturel de la France dans le monde et objet d’action diplomatique (un exemple du patrimoine immatĂ©riel : le repas gastronomique des Français) ».

  • Terminale Technologique – ThĂšme 3 : « La France de 1945 Ă  nos jours : une dĂ©mocratie » : Question obligatoire : « La France depuis 1945 : politique et sociĂ©té ».   (BO spĂ©cial n°8 du 25 juillet 2019 et BO spĂ©cial n°1 du 6 fĂ©vrier 2020)

Objectifs pédagogiques

Il y a plusieurs pistes d’entrĂ©es dans le thĂšme avec la figure de de Gaulle.

3 options possibles :

1. Charles de Gaulle comme figure patrimoniale (4h) :

Cette piste permet d’introduire le thĂšme et de proposer une dĂ©finition du patrimoine Ă  partir d’un dossier documentaire travaillĂ© en groupes.

2. Traitement du dossier comme fil conducteur du chapitre (30 min par entrée :

Comment la relation entretenue par de Gaulle avec le patrimoine permet-elle d’apprĂ©hender les Ă©volutions de la notion de patrimoine et ses usages ?

Il est possible d’utiliser un document qui introduit chaque axe du chapitre avant de continuer avec le reste du programme.

3. Traitement du dossier dans l’OTC

« La France et le patrimoine, des actions majeures de valorisation et de protection », – La gestion du patrimoine français : Ă©volutions d’une politique publique », « Le patrimoine, facteur de rayonnement culturel de la France dans le monde et objet d’action diplomatique » (4h)

De quelle maniÚre de Gaulle a-t-il marqué la politique patrimoniale française et avec quels objectifs ?

Comment le patrimoine participe-t-il selon de Gaulle au rayonnement et à la grandeur de la France ?

Il s’agit de constituer un dossier documentaire analysĂ© en groupes avec une restitution collective qui permet aux Ă©lĂšves Ă  la fin de la restitution de rĂ©pondre Ă  une question type composition (celles indiquĂ©es en gras par exemple)

Le professeur peut se charger sous forme de cours dialoguĂ© d’introduire les Ă©volutions postĂ©rieures (contestation, ouverture, dĂ©centralisation).

Les autres thĂšmes (Bassin Minier, repas gastronomique) peuvent ĂȘtre traitĂ©s sous forme d’exposĂ©s.

EXEMPLE 1

Intro :

  1.  Construction et Ă©largissement de la notion de patrimoine. De la transmission entre individus Ă  l’hĂ©ritage au profit de l’humanité (2h avec correction)

Il est possible de construire l’introduction Ă  partir du gĂ©nĂ©ral de Gaulle comme figure patrimoniale. Il s’agit en dĂ©but de sĂ©ance de s’assurer que le personnage est connu.

Faire un brainstorming rapide (5min) pour noter les éléments que les élÚves retiennent du personnage historique. Cela permet de voir ce que maßtrisent les élÚves.

  • Militaire 1e et 2e GM
  • DĂ©part Ă  Londres pour continuer lutte armĂ©e (18 juin) et faire reconnaĂźtre autoritĂ© politique française
  • LibĂ©ration de Paris
  • (« TraversĂ©e du dĂ©sert »)
  • Retour au moment de la guerre d’AlgĂ©rie et crĂ©ation Ve RĂ©publique
  • Crise de mai 1968 et dĂ©mission
  • Retraite Ă  Colombey, mort en 1970

Cela servira ensuite pour approfondir le sujet et comprendre que le patrimoine est une notion construite.

  1. Présentation rapide du dossier documentaire (dialogue 10-15 min)
  • (A lire) Incipit des MĂ©moires de de Gaulle lui-mĂȘme, rĂ©digĂ©s avant son retour au pouvoir : on y voit sa conception du patrimoine et du rĂŽle de la France
  • Patrimoine possĂ©dĂ© par la famille qui permet de voir Ă©galement les diffĂ©rents moyens de transmission et de conservation. On comprend Ă©galement qu’il y a une circulation des objets.
  • (A nommer) Lieux gaulliens privĂ©s et publics qui conservent une partie de la mĂ©moire du personnage. Les documents sont issus du site de la fondation, en charge de la transmission de la mĂ©moire. Parmi ces lieux on trouve la croix de Lorraine, installĂ©e sur le site oĂč a vĂ©cu et est mort de Gaulle. Il faut faire attention aux objectifs attribuĂ©s Ă  ces lieux, aux moyens de conservation, aux personnes et aux Ă©chelles gĂ©ographiques concernĂ©es.
  • Dossier de candidature (que les Ă©lĂšves liront seuls) auprĂšs de l’UNESCO pour faire inscrire les documents relatifs Ă  l’Appel du 18 juin 1940 comme patrimoine mondial. On s’intĂ©resse pour l’instant uniquement aux propriĂ©taires des documents, aux Ă©chelles, ce qui permet de dĂ©finir le patrimoine. On reviendra dans un 2e temps sur l’UNESCO et son fonctionnement Ă  partir de ce doc.
  • Photo du Grand Trianon du chĂąteau de Versailles : Montrer la photo, l’inscrire dans l’économie gĂ©nĂ©rale des lieux. Insister sur la symbolique monarchique et les liens que de Gaulle a Ă©tablis entre la RĂ©publique et la monarchie. La rĂ©novation du Trianon voulue par de Gaulle et Malraux s’inscrit bien dans cette prĂ©occupation majeure qu’était la prĂ©servation du patrimoine mais n’est pas dĂ©nuĂ©e de symbolique.

 

° Incipit MĂ©moires de guerre – L’Appel, pp 8-9, Paris, Plon, 2020 (Ă©d. or.1954)

« Toute ma vie, je me suis fait une certaine idĂ©e de la France. Le sentiment me l’inspire aussi bien que la raison. Ce qu’il y a, en moi, d’affectif imagine naturellement la France, telle la princesse des contes ou la madone aux fresques des murs, comme vouĂ©e Ă  une destinĂ©e Ă©minente et exceptionnelle. J’ai, d’instinct, l’impression que la Providence l’a créée pour des succĂšs achevĂ©s ou des malheurs exemplaires. S’il advient que la mĂ©diocritĂ© marque, pourtant, ses faits et gestes, j’en Ă©prouve la sensation d’une absurde anomalie, imputable aux fautes des Français, non au gĂ©nie de la patrie. Mais aussi, le cĂŽtĂ© positif de mon esprit me convainc que la France n’est rĂ©ellement elle-mĂȘme qu’au premier rang ; que, seules, de vastes entreprises sont susceptibles de compenser les ferments de dispersion que son peuple porte en lui-mĂȘme ; que notre pays, tel qu’il est, parmi les autres, tels qu’ils sont, doit, sous peine de danger mortel, viser haut et se tenir droit. Bref, Ă  mon sens, la France ne peut ĂȘtre la France sans la grandeur.

Cette foi a grandi en mĂȘme temps que moi dans le milieu oĂč je suis nĂ©. Mon pĂšre, homme de pensĂ©e, de culture et de tradition, Ă©tait imprĂ©gnĂ© du sentiment de la dignitĂ© de la France. Il m’en a dĂ©couvert l’Histoire. Ma mĂšre portait Ă  la patrie une passion intransigeante. [
] Petit Lillois de Paris, rien ne me frappait davantage que les symboles de nos gloires : nuit descendant sur Notre-Dame, majestĂ© du soir Ă  Versailles, Arc de Triomphe dans le soleil, drapeaux conquis frissonnant Ă  la voĂ»te des Invalides. »

 Le patrimoine des de Gaulle

  1. Exemple d’objets donnĂ©s par Philippe de Gaulle (le fils de Charles) au musĂ©e de l’Ordre de la LibĂ©ration en 2019 :
  • Croix de guerre 1914-1915 avec Ă©toile
  • Insigne de la 1Ăšre division de grenadiers polonais offert par la brigade polonaise Ă  Londres en 1941
  • Coffret Ă  cigarettes en argent offert par des officiers britanniques de l’armĂ©e du Rhin au commandant de Gaulle Ă  Verdun les 25 et 26 avril 1929
  • La plaque d’identitĂ© militaire et deux dĂ©corations ayant appartenu Ă  son grand-pĂšre, Henri de Gaulle (1848-1932) : sa croix d’officier de la LĂ©gion d’honneur et sa mĂ©daille commĂ©morative de la Guerre de 1870.

La notice de la veste de cuir du colonel de Gaulle portĂ© lors de la campagne de France mai-juin 1940 conservĂ©e au musĂ©e de l’ArmĂ©e (site du musĂ©e de l’ArmĂ©e)

Les lieux gaulliens :

a. La géographie (site de la fondation Charles de Gaulle)

« Qu’ils soient lieux de mĂ©moire ou musĂ©es, l’hĂŽtel particulier de la rue de SolfĂ©rino, la Maison Natale Ă  Lille, le MĂ©morial de Colombey-les-Deux-Églises, l’Historial et l’espace commĂ©moratif de l’aĂ©roport Roissy-Charles de Gaulle allient dĂ©sormais espaces scĂ©nographiques, interactivitĂ©, pĂ©dagogie, son et images pour rĂ©pondre Ă  une logique de transmission contemporaine. Chacun de ces espaces associe passĂ© disparu et prĂ©sent vivant. Tous participent Ă  rendre intemporel l’enseignement du plus “illustre des Français”.

b. L’exemple de la Croix de Lorraine (voir doc annexe)

Extraits du dossier de candidature pour l’inscription de l’Appel du 18 juin 1940, 21 juin 2004 (site Unesco) (voir doc annexe)

Missions : comprendre la notion de patrimoine, ses contours et ses évolutions

Par groupe de deux ou trois. 20 minutes de travail en autonomie pour les deux premiĂšres questions (prise de notes au sein du groupe) puis restitution orale par l’un des Ă©lĂšves du groupe (10 min). Puis le professeur complĂšte et ajuste pour s’assurer que tout est clair. Nouveau temps en groupes pour la question 3 (20 min). La question 4 peut ĂȘtre posĂ©e Ă  l’ensemble de la classe. La derniĂšre peut faire l’objet d’un nouvel Ă©change de groupe ou ĂȘtre rĂ©flĂ©chie collectivement.

Photo du GĂ©nĂ©ral de Gaulle qui reçoit le duc d’Edimbourg au Grand Trianon.  (site du ChĂąteau de Versailles)

Quels sont les éléments considérés comme faisant partie du patrimoine ?

On constate Ă  travers le dossier une variĂ©tĂ© des Ă©lĂ©ments constitutifs du patrimoine : c’est un terme polysĂ©mique.

  • En 1er lieu, dans le sens latin, le patrimoine est constituĂ© des biens acquis au sein d’une famille. Biens que l’on transmet aprĂšs la mort, en prioritĂ© Ă  ses descendants, mais pas seulement.

C’est le sens du doc 2 (objets) et 3 (Croix de Lorraine) :

  • Biens privĂ©s (documents, objets, mobiliers et immobiliers comme La Boisserie) ayant appartenu au pĂšre (Charles), grand-pĂšre (Henri) et transmis par la mĂšre (dans le cas des manuscrits du discours du 18 juin). La valeur des objets ici n’est pas artistique, comme cela pourrait ĂȘtre le cas d’une collection de peintures sur le modĂšle des MĂ©dicis Ă  la Renaissance ou des Rockefeller au dĂ©but XXe s, mais plutĂŽt historique et affective, ou un reflet de l’engagement familial auprĂšs de la nation.
  • Par le biais d’un legs, don, il y a une possibilitĂ© de transmettre aprĂšs sa mort une partie de son patrimoine Ă  une fondation caritative ou Ă  une institution. C’est une pratique trĂšs courante au Moyen-Age et Ă  l’époque moderne : on lĂšgue Ă  une institution religieuse pour assurer son salut. Ici les dons s’opĂšrent par l’intermĂ©diaire de la fondation du patrimoine pour restaurer la Croix de Lorraine. C’est est une fondation privĂ©e qui cherche Ă  mobiliser des fonds pour la sauvegarde du patrimoine, particuliĂšrement le « petit patrimoine » qui n’est pas protĂ©gĂ© par l’Etat (une autre facette du patrimoine par rapport Ă  ce que dĂ©crit de Gaulle dans ses MĂ©moires par ex).

On peut rappeler ici, point sur lequel il est possible de revenir dans l’OTC sur les politiques publiques, que la dation (don d’Ɠuvre prĂ©cieuse en Ă©change de l’exonĂ©ration des droits de succession) a Ă©tĂ© mise en place sous l’administration  de Gaulle en 1968.

  • L’échelle familiale n’est pas la seule Ă  considĂ©rer. Les MĂ©moires de de Gaulle prĂ©sentent une conception du patrimoine entendu comme patrimoine monumental Ă  valeur esthĂ©tique et historique, reflĂ©tant la grandeur religieuse, politique et militaire de l’Etat français Ă  travers les Ă©poques :
  • « ND Paris» : crĂ©ation Ă©talĂ©e sur deux siĂšcles (mi XIIe – mi XIVe s), c’ est donc une synthĂšse de l’art mĂ©diĂ©val et un emblĂšme du prestige capĂ©tien.
  • « Versailles» : chĂąteau associĂ© au Roi-Soleil, Bourbon Louis XIV, rĂ©sidence royale et siĂšge des institutions 1683-1789
  • « Arc de Triomphe» : crĂ©ation de NapolĂ©on pour cĂ©lĂ©brer les victoires militaires de la France Ă  partir de 1806.
  • « Invalides» : crĂ©ation de Louis XIV pour les invalides de guerre Ă  partir de 1670 et oĂč figure le tombeau de NapolĂ©on depuis 1840.

→ Ces Ă©lĂ©ments apparaissent comme le parcours type de la visite touristique (comme le suggĂšre l’expression « Petit Lillois de Paris ») mais ils montrent aussi, idĂ©e chĂšre Ă  de Gaulle, l’unitĂ© de la nation française, la continuitĂ© de la grandeur française, particuliĂšrement militaire : chacun de ces lieux a une origine royale et a Ă©tĂ© rĂ©appropriĂ©, parfois dans la douleur, par les dĂ©tenteurs successifs de l’autoritĂ© politique :

  • ND : lieu Ă©galement du sacre de NapolĂ©on Ier
  • Versailles : rĂ©appropriation par Louis-Philippe mais aussi par la RĂ©publique (dont de Gaulle lui-mĂȘme Ă  partir de 1958)
  • Arc de Triomphe : inauguration par Louis-Philippe en 1836 + cĂ©rĂ©monie du soldat inconnu
  • Invalides : continuitĂ© entre Louis XIV et NapolĂ©on

La métaphore du temps (« nuit »-« soir »-jour) renforce aussi cette idée de continuité historique.

  • Le patrimoine connaĂźt aussi autre acception : « petit patrimoine », patrimoine immatĂ©riel, naturel

Nous en avons des indices dans le dossier de l’UNESCO : ce que l’on considĂšre comme patrimoine c’est l’archive sonore, le manuscrit du brouillon du discours. Ce sont des dimensions diffĂ©rentes, Ă  une Ă©chelle plus « humaine » du patrimoine.

[Il est possible aussi de faire intervenir le patrimoine naturel, paysager. On peut s’appuyer sur le site de Colombey et sur l’exemple du MĂ©morial. En effet, il est volontairement fait une place Ă  la terre de Colombey au sein du mĂ©morial :

«  L’ensemble est parcouru par le sillon de Colombey, sillon matĂ©rialisĂ© sur le sol et illustrĂ© par un faisceau sonore composĂ© de bruits de feuilles mortes, de pas dans la neige et de chants d’oiseaux. », E.Cohen, et P. Goetschel, « Historial et MĂ©morial : deux lieux de mĂ©moire et d’histoire consacrĂ©s au gĂ©nĂ©ral de Gaulle », SociĂ©tĂ©s & ReprĂ©sentations, 2008.

De mĂȘme lorsqu’on visite La Boisserie l’environnement, la vue dĂ©gagĂ©e depuis le bureau du gĂ©nĂ©ral contribuent directement Ă  l’atmosphĂšre particuliĂšre du lieu.

Enfin, dans le dossier sur la Croix de Lorraine on rappelle que le site sur lequel s’élĂšve la croix ne doit comporter « aucune autre construction visible depuis la Boisserie », c’est une forme de sanctuarisation de ce patrimoine paysager.]

Quelles sont les évolutions concernant le public, les destinataires du patrimoine ?

  • Du privĂ© au public

Nous avons des indices dans l’histoire des objets de la famille de Gaulle:

D’abord conservĂ©s et transmis de maniĂšre classique dans l’enceinte familiale, du vivant des personnes ou par testament : ainsi le texte du discours a Ă©tĂ© transmis Ă  Philippe de Gaulle par sa mĂšre peu avant sa mort. Ces objets deviennent ensuite des Ă©lĂ©ments des collections publiques conservĂ©s dans des institutions musĂ©ales et apparaissent comme des biens communs, des « trĂ©sors » (notice de la veste de cuir).

C’est la mĂȘme logique qui est dĂ©veloppĂ©e dans le dossier sur la Croix de Lorraine par la Fondation du Patrimoine : l’idĂ©e que « tous les Français » sont dĂ©sormais dĂ©tenteurs de ce patrimoine.

La transformation Ă  l’Ɠuvre a Ă©tĂ© bien sentie par de Gaulle lui-mĂȘme, comme en tĂ©moigne cette citation extraite du dossier de l’UNESCO : « conservez prĂ©cieusement ces manuscrits, si je rĂ©ussis ils feront partie du patrimoine de nos enfants ». Ici les enfants ne sont pas seulement le fils et les filles de de Gaulle, mais plus sĂ»rement les enfants de France. La mĂ©tamorphose privĂ©/public s’opĂšre ici Ă  la faveur de la transformation de de Gaulle lui-mĂȘme en personnage public national.

  • Une dĂ©mocratisation et un Ă©largissement du public

L’étude du dossier pour la restauration de la Croix nous montre que non seulement l’ensemble de la nation est concernĂ© par cet Ă©lĂ©ment de patrimoine mais aussi que le public touchĂ© n’est plus forcĂ©ment celui que mentionnait de Gaulle dans ses MĂ©moires.  La grande culture historique de de Gaulle reflĂšte celle des Ă©lites cultivĂ©es de la fin du XIXe, de province ou de Paris. Il faut attendre la 2e moitiĂ© du XXe siĂšcle pour voir s’élargir l’accĂšs Ă  la culture et au patrimoine en particulier.

Ainsi le dossier mentionne une « dynamique populaire » qui permet Ă  la souscription de remporter un succĂšs « massif ». C’est d’ailleurs « 400 000 personnes » qui se rendent la 1e annĂ©e de l’inauguration sur ce lieu.

Le public concernĂ© par le patrimoine gaullien s’internationalise, c’est 67 pays diffĂ©rents qui participent Ă  la souscription initiale de 1971. On peut faire la mĂȘme remarque Ă  partir de l’analyse de la circulation des objets ayant appartenu au gĂ©nĂ©ral. Ainsi la veste a fait partie d’exposition Ă  Cherbourg, Ă  PĂ©kin et Ă  Moscou.

C’est enfin le sens du registre « MĂ©moire du monde » encadrĂ© par l’UNESCO. La 2e partie de l’introduction du cours se concentrera particuliĂšrement sur cette institution mais on peut dĂ©jĂ  rappeler que l’UNESCO considĂšre un Ă©lĂ©ment qui a un « intĂ©rĂȘt universel » et qui tĂ©moigne d’une histoire commune.

Cela montre tout Ă  la fois le rayonnement de la figure de de Gaulle et le fait que le patrimoine traverse les frontiĂšres.

Quels sont les objectifs du patrimoine ? Comment les assurer ?

On a montrĂ© la variĂ©tĂ© des Ă©lĂ©ments constitutifs du patrimoine (monument, objet, voix), du patrimoine gaullien en particulier. Mais les usages, ce qu’on attend du patrimoine, sont Ă©galement trĂšs larges.

On note tout d’abord que le patrimoine se situe Ă  la croisĂ©e de diffĂ©rentes dimensions temporelles (passĂ© /prĂ©sent/futur) :

La notice de la fondation de Gaulle prĂ©sentant les lieux gaulliens met bien en avant ce point. La fondation explique que ces lieux « associe [nt] passĂ© disparu et prĂ©sent vivant ». Elle insiste sur l’idĂ©e de la « transmission » qui est au cƓur de son rĂŽle.

Le patrimoine est donc un Ă©lĂ©ment qui est transmis Ă  des publics variĂ©s et qui crĂ©e des ponts entre les gĂ©nĂ©rations. Ici, il s’agit de rendre toujours vifs la pensĂ©e et l’engagement gaulliens pour des Hommes qui n’en sont plus forcĂ©ment les contemporains.

Afin de remplir cet objectif, les acteurs publics et privĂ©s du patrimoine ont diffĂ©rentes missions : c’est la trilogie conservation/prĂ©servation/valorisation

  • Le patrimoine doit ĂȘtre rĂ©fĂ©rencĂ© et conservĂ©. C’est bien la responsabilitĂ© par ex des musĂ©es, celui de l’ArmĂ©e par ex ou de la fondation. La notice de la veste de de Gaulle rappelle bien les caractĂ©ristiques prĂ©cises de l’objet afin d’en assurer une conservation optimale. Nous avons un autre exemple avec le dossier constituĂ© pour l’Appel du 18 juin. Les promoteurs du dossier exposent le lieu et les conditions de conservation des diffĂ©rents documents.
  • Le patrimoine doit aussi faire l’objet d’une prĂ©servation. Le dossier portĂ© Ă  l’UNESCO insiste bien sur le danger que courent les archives sonores radiodiffusĂ©es. Elles sont prĂ©sentĂ©es comme un « patrimoine fragile ». Elles nĂ©cessitent un environnement spĂ©cifique (peu d’humiditĂ©, tempĂ©rature particuliĂšre, 
) Se pose la question aussi de la transposabilitĂ© des enregistrements. Il s’agit donc d’assurer au patrimoine une protection contre la dĂ©gradation (Croix de Lorraine), la destruction et la disparition afin de prĂ©server la possibilitĂ© de la transmission. L’inscription Ă  UNESCO est aussi moyen pour protĂ©ger le patrimoine en en reconnaissant sa valeur universelle. Lorsque le patrimoine est endommagĂ© il est question de le restaurer (normalement Ă  l’identique) comme c’est le cas de la Croix.
  • DerniĂšre mission qui est liĂ©e Ă  la transmission Ă©galement : la valorisation du patrimoine. Les documents illustrent la variĂ©tĂ© des mises en valeur possibles :
  • Mise en exposition des objets, archives audio, Ă  destination d’un public, particuliĂšrement les jeunes : ce sont les objectifs de l’Historial (Paris), MĂ©morial (Colombey). Ces deux derniers lieux sont rĂ©cents (2008- pour les 50ans de la Ve RĂ©publique) et mĂȘme si leur origine et leur organisation diffĂšrent, ils tĂ©moignent d’une volontĂ© de moderniser la musĂ©ographie classique en donnant naissance Ă  des lieux contemporains, interactifs, aptes Ă  crĂ©er des liens entre passĂ© et prĂ©sent.
  • Tourisme qui peut prendre la forme ci-dessus, mais aussi simplement comme prĂ©sence sur les lieux prĂ©sentant un intĂ©rĂȘt patrimonial : recueillement au pied de la Croix de Lorraine, parcours des lieux gaulliens.
  • Utilisation de campagne de publicitĂ© pour donner de la visibilitĂ© Ă  ce patrimoine gaullien : une partie de la documentation vient de dossier de presse, de communiquĂ© (Croix de Lorraine) qui ont Ă©tĂ© faits pour Ă©clairer les actions menĂ©es.
  • DĂ©marche scientifique menĂ©e par la fondation de Gaulle pour encourager les travaux sur les Ă©lĂ©ments du patrimoine gaullien.

A partir des lieux gaulliens, du brainstorming réalisé ensemble, du dossier UNESCO et du dossier de la croix de Lorraine

Le patrimoine est-il seulement un héritage du passé ?

Patrimoine = hĂ©ritage, ce qui est transmis. Mais il faut bien comprendre que s’opĂšre une sĂ©lection, un tri.  Le patrimoine, c’est ce que l’on choisit de transmettre car on considĂšre que l’objet, site, personnage, moment, doc est digne de l’ĂȘtre. Dans le brainstorming, chacun a mis en avant aspect particulier sur lequel il y a souvent consensus, mais pas forcĂ©ment.

Pour la construction de la Croix de Lorraine, il y a eu 12 projets et c’est Yvonne de Gaulle qui a choisi celui qui lui semblait le mieux incarner les valeurs portĂ©es par son mari.

Les docs montrent des Ă©lĂ©ments qui acquiĂšrent le statut de patrimoine, qui sont transformĂ©s progressivement en lieu, en objet patrimonial : c’est l’exemple des lieux gaulliens, La Boisserie par exemple acquiert une valeur importante pour les Français, elle est patrimonialisĂ©e. Dans cette transformation, il y a bien une volontĂ© de mettre en avant une chose plutĂŽt qu’une autre parce qu’on la juge porteuse de valeurs que l’on souhaite transmettre.

A partir du travail rĂ©alisĂ©, essayez de formuler une dĂ©finition du patrimoine. Les groupes s’échangent leur dĂ©finition

La forme ici peut ĂȘtre plus libre mais il faut s’assurer que les diffĂ©rents moments expliquĂ©s le long du travail ont Ă©tĂ© compris :

  • Notion polysĂ©mique (monument, art, objet, document, immatĂ©riel et naturel), volontairement accueillante et floue
  • Notion qui s’est Ă©largie (du privĂ©, de l’élite Ă  la nation) et touche un public national et international
  • VolontĂ© de sĂ©lectionner ce qui est digne d’ĂȘtre conservĂ© et transmis.

 

Indications bibliographiques :

Articles et ouvrages :

  • Cohen et P. Goetschel, « Historial et MĂ©morial : deux lieux de mĂ©moire et d’histoire consacrĂ©s au gĂ©nĂ©ral de Gaulle », SociĂ©tĂ©s & ReprĂ©sentations, vol. 26, no. 2, 2008, pp. 219-231
  • Jackson, De Gaulle, Une certaine idĂ©e de la France, Seuil, 2019

Sites consultés :